APRES LES REVELATIONS TROUBLANTES DE ROBERT BOURGI - LE POUVOIR DE OUATT...



    Les révélations récentes de l’avocat franco-sénégalais Robert Bourgi ont jeté un pavé dans la mare politique ivoirienne et, par extension, dans les relations franco-africaines. Selon lui, lors des élections de 2010 en Côte d'Ivoire, Laurent Gbagbo aurait remporté la présidentielle face à Alassane Ouattara, mais Nicolas Sarkozy, alors président français, aurait orchestré la destitution de Gbagbo pour installer Ouattara au pouvoir. Une telle déclaration, provenant d’une figure proche des cercles politiques français, soulève des questions fondamentales sur la légitimité actuelle du pouvoir d’Alassane Ouattara et sur la nécessité de rendre justice à Laurent Gbagbo.

Une Légitimité Délégitimée ?

Depuis son accession au pouvoir en 2011, Alassane Ouattara a su maintenir une stabilité économique en Côte d’Ivoire, et son mandat a été salué pour la relance économique. Cependant, les circonstances de son arrivée au pouvoir ont toujours été controversées, notamment à cause de la crise post-électorale qui avait plongé le pays dans le chaos. Aujourd’hui, les propos de Robert Bourgi résonnent comme une bombe : si Gbagbo avait vraiment gagné les élections, alors le fondement même du régime Ouattara pourrait être remis en question.

Un gouvernement tirant sa légitimité d’une intervention militaire internationale, orchestrée par un autre État, devient forcément suspect aux yeux de ses opposants. Certes, Ouattara a bénéficié de la reconnaissance internationale, mais si cette reconnaissance est fondée sur une manipulation, cela devient un coup dur pour la légitimité démocratique de son pouvoir. Peut-on encore parler de légitimité si l’histoire elle-même est remise en cause par ceux qui ont participé aux coulisses de ce changement politique ?

Justice Pour Laurent Gbagbo ?

Après des années de procédure devant la Cour pénale internationale (CPI), Laurent Gbagbo a été acquitté de toutes les accusations de crimes contre l’humanité en 2019. Cette victoire judiciaire a renforcé ses partisans, qui y ont vu la reconnaissance d’une injustice flagrante. À leurs yeux, non seulement Gbagbo est innocent des crimes pour lesquels il a été jugé, mais il est aussi le véritable vainqueur des élections de 2010.

Les révélations de Robert Bourgi donnent à cette thèse encore plus de poids. Si l’on suit cette logique, Laurent Gbagbo aurait dû rester au pouvoir, et sa destitution serait le résultat d’une intervention extérieure, plutôt qu’un processus démocratique légitime. Dans ce contexte, des appels à sa réinstallation à la présidence pourraient émerger, notamment parmi ses partisans les plus fervents. Cependant, un retour en arrière semble hautement improbable sur le plan politique, tant les structures du pouvoir en Côte d’Ivoire ont changé depuis 2011.

Les Implications Internationales

La France, en particulier sous Nicolas Sarkozy, a toujours été perçue comme jouant un rôle décisif dans la politique ivoirienne. Ces révélations, si elles sont véridiques, risquent d’affaiblir la crédibilité de la France en Afrique, dans un contexte où le sentiment anti-français s’intensifie dans de nombreux pays du continent. Cette nouvelle donnée pourrait aussi déstabiliser les relations franco-ivoiriennes, surtout si des pressions internes ou internationales s’accentuent pour réclamer des explications sur ce qui s’est réellement passé en 2010.

Vers Quel Avenir ?

Aujourd’hui, la Côte d'Ivoire est à un tournant crucial. Les élections à venir et la stabilité du pays reposent en grande partie sur la perception que le peuple et la communauté internationale ont du pouvoir en place. Si le pouvoir de Ouattara venait à être perçu comme illégitime, ou entaché par une ingérence étrangère, cela pourrait relancer les tensions politiques.

Néanmoins, un retour de Laurent Gbagbo au pouvoir est peu probable dans le contexte actuel. La question principale devient donc celle de la réconciliation nationale. Les Ivoiriens peuvent-ils dépasser cette controverse pour se concentrer sur l’avenir, ou seront-ils tiraillés par les fantômes du passé ?

En somme, la question de la légitimité du pouvoir d'Alassane Ouattara après les révélations de Robert Bourgi est complexe. La justice envers Laurent Gbagbo, victorieux à la CPI, ne pourra être totalement réalisée qu’à travers une reconnaissance collective des faits et, peut-être, un nouvel élan de réconciliation nationale. Car au-delà des hommes politiques, ce sont les Ivoiriens qui paient le prix des divisions.



David GBEDIA

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