JOURNÉE INTERNATIONALE DE L'ENFANT AFRICAIN | LE FORUM DES ONG INDIGNÉ DE LA PRESENCE DE LA DROGUE À L'ÉCOLE
La présence de la drogue communément appelée "Kadafi" dans les environs des établissements scolaires constitue une situation préoccupante au sein de la population ivoirienne et particulièrement pour Le Forum des ONG. À la faveur de la Journée Internationale de l'Enfant Africain 2024 célébrée chaque 16 juin, le président Kouakou Osséi dudit Forum, chargé, entre autres, du suivi des mécanismes régionaux et internationaux de surveillance des droits de l’enfant, a marqué son indignation face à plusieurs fléaux et situations sociales qui compromettent les droits et bien-être des enfants. Parmi ceux-ci, il a principalement pointé du doigt la drogue "Kadafi" pour laquelle il interpelle les autorités.
Nous vous proposons l'intégralité de sa déclaration
Le Forum des ONG est le réseau ivoirien de Protection, de Promotion et de Défense des droits de l’enfant en Côte d’Ivoire composé de 70 organisations actives. Il a pour mission de faire le suivi des droits de l’enfant par ses organisations membres à travers le Plaidoyer, le Renforcement des capacités, la Mobilisation communautaire et la Participation des enfants. Avec l’appui financier et technique de Save the Children, de l’UNICEF et du Bureau International des Droits des Enfants, il est impliqué dans :
• Le suivi des mécanismes régionaux et internationaux de surveillance des droits de l’enfant,
• Le suivi de la mise en œuvre de la bonne gouvernance pour les droits de l’enfant par le gouvernement, les communautés et le secteur privé
• L’harmonisation de la législation ivoirienne avec les standards régionaux et internationaux de surveillance des droits de l’enfant.
• Le suivi des allocations budgétaires en faveur de la protection de l’enfance.
Depuis 34 ans maintenant, la communauté africaine célèbre chaque 16 juin la Journée de l’Enfant Africain. Cette journée vise à rappeler à tous (Etats, partenaires techniques et financiers, parents, OSC et même aux enfants) que les enfants à l’instar des adultes ont des droits qui doivent être respectés par tous et garantis par l’Etat pour leur épanouissement. C’est une occasion de prise de conscience africaine voire universelle sur la nécessité d’agir ensemble pour les droits et le bien-être des enfants d’Afrique. Pour rappel, Cette Journée de l'Enfant Africain est un événement annuel qui commémore le massacre des enfants de Soweto en 1976 par le régime de l'apartheid.
En 2024, le thème de la JIEA est « L’éducation pour tous les enfants en Afrique : l’heure est venue ». Ce thème est conforme à celui de l'Union africaine pour l'année en cours et qui se lit comme suit : "Éduquer une Afrique adaptée au 21e siècle : Construire des systèmes éducatifs résilients pour un accès accru à un apprentissage de qualité, inclusif et pertinent tout au long de la vie en Afrique." Ce thème a été adopté lors de la 36ème session Ordinaire de l'Assemblée des Chefs d'État et de Gouvernement de l'UA, qui s'est tenue en février 2023. L’UA s’est concentrée sur l’éducation pour 2024, compte tenu des divers défis auxquels ses États membres sont confrontés en matière de l’éducation, en particulier à la suite de la catastrophe du Covid-19. En outre, l’accent mis sur l’éducation fait suite à l’évaluation de la mise en œuvre de l’ODD4 et de la Stratégie continentale de l’UA pour l’éducation en Afrique (CESA) qui a révélé que malgré les diverses réalisations, les États africains sont confrontés à un nombre croissant de personnes non scolarisées, à un manque d’éducation de qualité et à un ratio enseignant/élève plus élevé. C’est dans ce contexte que les dirigeants africains ont décidé de consacrer l'année 2024 à l’éducation afin d’intensifier les efforts et d'assurer une éducation pour tous en Afrique.
En outre, en 2004 le Comité des Experts pour le Droits et le Bien être des Enfants a adressé ses observations finales suite au passage de la Côte d’Ivoire en 2024, pour la présentation du rapport sur la mise en œuvre de la Charte Africaine des droits et du bienêtre de l’enfant. Parmi les observations finales du Comité, 13 recommandations concernent l’éducation.
L’Etat Ivoirien a choisi le thème « Une éducation inclusive et/ ou adapté pour une meilleure protection des enfants en Côte d’Ivoire » comme thème national au titre de l’année 2024.
Il est vrai les états généraux de l'éducation nationale Ivoirienne de 2021, ont redoré l’école ivoirienne par la promotion de la performance et de l'excellence. C’est à juste titre que pour faciliter l’accès à l’école des filles, des garçons des zones urbaines et rurales et de toutes les couches sociales, l’Etat Ivoirien a pris plusieurs dispositions légales et systémiques. Il s’agit de la construction d'infrastructures scolaires dont des universités ultra modernes, des lycées d'excellence pour jeunes filles, l’expérimentation de l’école inclusive avec la formation de 36 enseignants du primaire, 24 du secondaire et 12 éducateurs qui ont bénéficié des compétences complémentaires en braille, en langue des signes et en pédagogie différentielle. Dans le même ordre d’idées, il y a eu de nombreuses initiatives pour l’école passerelle et l’école de la seconde chance.
Nonobstant, ces efforts de l’Etat ivoirien pour l’Education et particulièrement l’Education inclusive, nous constatons que l’éducation fait toujours face à d’énormes défis. En effet, le Forum des ONG constate l’impact de l’action publique visant la démolition de 93 quartiers précaires abritant des écoles depuis février 2024, en pleine année scolaire avec plus de 1880 élèves du secondaire et 600 élèves du primaire à la rue qui vient exacerber la réalité d’absence de rampes et de matériels didactiques adéquats dans plusieurs établissements pour un accès inclusifs. Le Forum des ONG note également l’insuffisance d’enseignants dans certaines localités dû à la défaillance d’effectif ou au refus de certains enseignants de s’établir dans leur lieu d’affectation qu’ils jugent précaire ; l’insuffisance d'infrastructures, le surpeuplement des salles de classe (en moyenne 80 élèves par classe contre 30 à 33 recommandés par l’UNESCO), la double vacation soulevant la préoccupation de la complétude des heures de cours annuelles. Notons aussi le changement intempestif de programme pédagogique et de manuels éducatifs tous les deux ans, en plus de la marchandisation de l'école qui se manifeste par les « cours de renforcement », facturés selon les régions entre 10.000 et 30.000 francs CFA/mois par élève en plus des fascicules imposés différents des manuels scolaires. La société civile décrie une différence de la qualité des cours prodigués en «cours de renforcement » et dans les salles de classe. De plus, les établissements scolaires érigés en commerces imposent des articles et accessoires scolaires aux élèves. Ces frais annexes qui échappent au contrôle du gouvernement, exacerbent l’abandon scolaire des enfants des ménages démunis qui croulent déjà sous le poids de l’inflation. Pourtant les bourses d’études méconnues des populations sont peu exploitées par les parents. De même, les activités extra scolaires peu diversifiées et vulgarisées n’ont pas d’adhésion. L’école ivoirienne est aussi minée par la drogue appelé « Kadafi » menaçant la sécurité à l’école autant que la recrudescence inquiétante de la violence telle que les assassinats observés parmi le corps enseignant.
C’est pourquoi le Forum des ONG recommande à l’Etat de Côte d’Ivoire de :
Promouvoir l’école inclusive en dotant 50% des établissements scolaires de rampes, toilettes, équipements et matériels didactiques adaptés, en formant les étudiants du CAFOP, de l’ENS et INSFS sur les modules d’enseignements spécialisées, sur les mesures de prévention des exploitations et des abus sexuels tout en promouvant les mécanismes adaptés tels que le langage de signe, les brailles, la gestion des comportements en faveur des enfants à besoins spécifiques.
Assurer la pérennisation et la mise en œuvre effective de la circulaire N°276/MENA/DPFC du 31 juillet 2023 en prenant des mesures contre l’instauration des cours de renforcement par certains professeurs et mettre en place des moyens de coercition contre les établissements et fonctionnaires publiques s’adonnant à ces pratiques et veiller à l’uniformisation des manuels scolaires sur une période minimum de cinq ans dans tous les établissements scolaires ;
Intensifier sur la base des statistiques des besoins des régions, la construction d’écoles, le recrutement d’enseignants en nombre suffisant ;
Prendre des mesures pour combattre la drogue en milieu scolaire par la création de ligne verte avec la collaboration de la brigade anti-drogue, la mise en place des cellules d’informations, de sensibilisation et d’une brigade de surveillance en collaboration avec la police ;
Le recrutement et la mise à disposition des écoles des psychologues pour aider à l’entretien de la santé mentale des acteurs du système éducatif.
Sensibiliser les parents à s’impliquer davantage dans le suivi scolaire des enfants.
RECOMMANDATIONS DU COMITÉ AFRICAIN DES DROITS ET DU BIEN-ÊTRE DE L’ENFANT
Prendre les mesures nécessaires pour appliquer les Lois et textes en vigueur ;
Adopter la Loi sur l’alimentation scolaire et d’assurer l’existence de cantines dans tous les écoles préscolaires et primaires sur l'ensemble du territoire national en allouant les ressources nécessaires à l’approvisionnement des cantines scolaires existantes ;
Continuer les progrès visant à garantir l’accès à une éducation de qualité aux enfants en intégrant les structures islamiques d’éducation dans le système éducatif formel ainsi que l'amélioration et la construction d'infrastructures scolaires et le recrutement de personnel qualifié en particulier dans les zones rurales ;
Intensifier les efforts pour améliorer l’accès à l’enseignement préscolaire y compris l’adoption de textes règlementaires de l’enseignement préscolaire en Côte d’Ivoire et la sensibilisation des parents à l’importance de la préscolarisation au développement de la petite enfance ;
Poursuivre les efforts pour améliorer la participation et l’achèvement dans l’enseignement primaire et secondaire et de s’attaquer aux facteurs d’abandon scolaire et les inégalités de genre à travers la sensibilisation de la communauté et les familles sur l’importance de l’éducation, et le renforcement de rôle de travailleurs sociaux dans le suivi des enfants inscrits pour les maintenir dans les écoles ;
De faciliter aux adolescents l’accès aux moyens de contraception, et intensifier les efforts de sensibilisation des enfants et les parents en matière de la santé de la reproduction sur les causes et les conséquences des grossesses et de fournir l’accompagnement et le suivi aux filles enceintes ou mères tout au long de leur procédures de report de leur scolarité par les services sociaux ;
Poursuivre la réouverture et la reconstruction des internats dans les établissements scolaires afin de prévenir et réduire les risques de grossesses de jeunes filles.
Fait à Abidjan le 16 juin 2024, je vous remercie.
Pour le Forum des ONG, le Président KOUAKOU Osséi
Commentaires